République Dominicaine

République Dominicaine : le sud-ouest, du lago Enriquillo à la péninsule de Pedernales

Après notre premier passage à Santo Domingo, nous voilà partis pour 10 jours dans le sud-ouest de la République Dominicaine, du côté du Lago Enriquillo et de la péninsule de Pedernales, à la limite de la frontière avec Haïti. On se lance dans un road trip (en voiture de location pour pouvoir s’arrêter un peu partout) pour explorer cette région très peu touristique de la Rep’ Dom’ : c’est l’occasion de découvrir le pays hors des sentiers battus, dans une région assez reculée et aussi moins développée que le reste du pays.

Le Lago Enriquillo

La première partie de ce road trip nous conduit vers le lago Enriquillo, un vaste lac (long d’environ 35 km) qui a pour particularités d’être salé et de se trouver en dessous du niveau de la mer, et qui porte le nom d’un chef Taïnos qui avait résisté à l’invasion espagnole.

Au départ de Santo Domingo et jusqu’à la ville de Bani, on suit une autopista qui ensuite devient brusquement une départementale assez pénible, avec des poids lourds qui roulent au pas et une circulation anarchique : dépassements aussi bien par la droite que par la gauche, motos à contresens sur la bande d’arrêt d’urgence, coupages de route en veux-tu en voilà… la conduite est assez sportive et demande un peu de concentration ! Côté paysages, la région est très verte, mais avec une végétation assez basse, de moins en moins tropicale et qui progressivement devient une sorte de savane, avec cactus et arbustes (mais quand même toujours les bananiers). Vers le nord, on a vue sur les premiers contreforts de la cordillera centrale, la zone montagneuse et agricole du centre de la République Dominicaine.

On traverse des modestes villages (voire des villages franchement pauvres avec plus de cabanes en bois et en taule que de maisons en dur, et des enfants qui vendent des trucs sur la route), et des zones rurales où les gens se déplacent encore parfois à cheval (même si les motos sont, de loin, majoritaires). Certains villages sont très calmes, mais dans beaucoup d’autres, c’est la fête, avec des grosses basses poussées à fond et des gens qui dansent dans la rue.

Les possibilités d’hébergements ne sont pas nombreuses dans le coin. On visait une première étape à Neiba, la « grosse » ville autour du lac, mais la ville et ses trois petits hôtels ne font vraiment pas rêver et on a décidé de poursuivre jusqu’au village de La Descubierta, au nord-ouest du lac. On a bien fait car on y a atterri dans une petite pension (Pension Iguana) tenue par une famille très sympa, avec des chambres très correctes et pas chères du tout, et une ambiance familiale (les enfants qui courent partout, la grand mère qui nous demande discrètement un verre de vin pendant que les autres ne la voient pas… !!).

Le lendemain, on part explorer les rives du lac. Il y a un petit point d’information d’où partent des balades en bateaux (hors de prix et qu’on a donc zappées), et au niveau duquel on peut accéder à la rive. Le paysage est vraiment étonnant : le lac est une sorte de mer intérieure (un peu comme la mer morte, qu’on avait pu voir en Jordanie), avec une eau trois fois plus salée que celle de la mer, et ses rives sont arides et quasi désertiques : le sol est un mélange de pierre, de petits coquillages et de coraux pétrifiés, la végétation est basse, et de l’eau émergent des arbres morts (une « forêt submergée » apparue avec le recul du niveau de l’eau). Le tout forme un ensemble assez irréel. Pour ajouter au tableau, le lac abrite pas mal d’oiseaux, mais aussi une espèce particulière d’iguane (des iguanes rhinocéros !) qu’on peut voir très facilement, ainsi que des crocodiles (qu’on n’a pas vus, par contre).

Un peu après le point d’information, on fait un arrêt à la Cueva Las Caritas, une petite grotte en hauteur à flanc de colline à laquelle on accède en quelques minutes de grimpette, qui abrite quelques pétroglyphes Taïnos (comme dans le parc Los Haitises) et d’où on a une belle vue sur le lac, l’île qui se trouve au milieu (la Isla Cabritos) et ses rives, même si lors de notre passage la visibilité n’était pas au top.

Une particularité de la région, c’est qu’on y trouve aussi… de la vigne, et du vin ! Plutôt original dans les Caraïbes, et donc évidemment on a fait un arrêt pour jeter un œil aux vignes, et pour gouter le vin… qu’on a trouvé vraiment pas très bon ! Muy Dulce le premier vino qu’on a essayé, tellement fruité et sucré qu’il se rapproche plus d’un porto que d’un vin rouge tel qu’on en a l’habitude !  Quant au deuxième, là c’était un vin plus classique, mais bon, pas vraiment génial non plus…

Enfin, pour terminer la journée on a décidé d’aller se rafraichir en allant se baigner dans l’une des piscines naturelles de la région : ce sont des bassins alimentés par les rios qui descendent des montagnes, et qui sont très populaires. A chacun son style : le premier où on est allés, celui de Las Marias, près de Neiba, était bondé et ultra bruyant (reggaeton à fond, stands de nourriture, etc), le deuxième, celui de La Descubierta, était beaucoup plus tranquille et familial. Et pour ce qui est de se rafraîchir, c’est réussi car l’eau est… glaciale !

Le lendemain, on reprend la route pour continuer notre tour du lac, en faisant un arrêt à Jimani, qui est une ville frontière avec Haïti, pour aller voir son marché haïtien. En fait le marché ne se tient pas vraiment en ce moment en raison de la situation instable en Haïti (la frontière est partiellement fermée depuis l’assassinat du président haïtien, puis le tremblement de terre et la tempête qui ont suivi ont aussi compliqué les choses), mais il y a quand même des ventes en gros de fruits et légumes, à 500 mètres du poste frontière. Ce sont les agriculteurs haïtiens qui viennent vendre leur production côté dominicain, avec leurs camions pleins de couleurs et d’inscriptions en français : lors de notre passage, c’était jour de vente de bananes et de citrons verts. On en a rarement vu de telles quantités !

Après Jimani, on poursuit notre tour du lac, par la rive sud : de ce côté-là il y a beaucoup moins de village et la région est plus désertique. La route longe les montagnes puis rejoint le bord du lac, avec à nouveau des possibilités de pauses photos sur les rives.

Le tour du lac se termine au niveau du village de Duvergé, après lequel on peut voir une grande statue d’Enriquillo. Ensuite, en poursuivant la route, on arrive à Barahona (la capitale régionale) et on rejoint donc la côte.

La côte de Barahona à Enriquillo

Au sud de Barahona, la route longe la côte pendant 50 kilomètres jusqu’au village d’Enriquillo (encore lui, mais rien à voir avec le lac cette fois). Le paysage est superbe avec la mer des caraïbes turquoise d’un côté et les montagnes couvertes de végétation tropicale qui descendent en pentes raides vers la mer de l’autre.

La route traverse une série de petits villages de pêcheurs installés en bord de plage au pied des montagnes, des villages tout simples aux cabanes colorées : Baoruco, La Ciénaga, Paraiso ou encore Los Patos avec son balneario très populaire (une piscine naturelle alimentée par un rio au bord de la plage : l’endroit est bondé !).

On avait pensé faire une halte de quelques jours dans l’un de ses villages, mais une fois sur place on a finalement renoncé. Les plages ne se prêtent pas du tout à la baignade (la mer est dangereuse et les plages de galets sont franchement sales) et sont plus un lieu de travail pour les pêcheurs qu’un cadre de farniente, on se voyait mal s’y poser. En plus il n’y a pas beaucoup d’hébergements possibles, beaucoup d’adresses qu’on avait repérées ont fermé et les quelques hôtels / pensions qu’on a trouvés étaient sommaires et faisaient l’affaire pour un dépannage d’une nuit, mais pas tellement plus. On a donc poursuivi jusqu’à Enriquillo, où on a trouvés un peu par hasard un hébergement : c’est le gérant d’un hôtel fermé pour travaux qui a interpelé son voisin qui tient aussi un hôtel (mais il faut le savoir, il n’y a aucune enseigne ni rien qui permette de l’identifier, c’est une maison comme une autre) en lui demandant de nous dépanner. A priori lui aussi était plus ou moins fermé, il n’y avait aucun client et pourtant aucune chambre n’était prête, mais il a gentiment rouvert pour nous.

Vue sur le village d’Enriquillo

Après une rapide tentative de baignade pour la forme (mais qui n’a pas été une réussite : les vagues étaient violentes et on a fui vite fait bien fait quand on a réalisé qu’il y avait… des mini vers sur les galets !!) et une nuit de repos on a donc directement poursuivi la route vers notre ultime destination vers l’Ouest, la péninsule de Pedernales, réputée pour ses plages sublimes et isolées.

La Péninsule de Pedernales et la sublime plage de Las Aguilas

Cette fois la route nous amène vers le bout du bout de la République Dominicaine, à l’extrême sud-ouest, de nouveau en bordure d’Haïti.

Après Enriquillo la route passe au niveau de la laguna Oviedo avec ses eaux jaunâtres, puis s’éloigne de la côte et coupe par l’intérieur des terres. On traverse quelques hameaux et de vastes plantations de bananes, puis le paysage change encore : on est maintenant au milieu d’une végétation de savane sèche à perte de vue. La zone est protégée, c’est le parc national de Jaragua.

La route est meilleure que ce à quoi on s’attendait : c’est seulement à partir de l’embranchement pour Cabo Rojo et Las Aguilas qu’elle devient une piste, mais très praticable, du moins par temps sec. La terre devient rouge, ça nous rappelle la Guajira colombienne ou même le Ratanakiri au Cambodge.  

En à peine plus d’1h30 (pauses photos comprises), on arrive au niveau de la Cueva. C’est le bout de la route, et la première des deux belles plages qui justifient de venir ici. Quand on arrive, on tombe tout de suite sous le charme de l’endroit. La plage est superbe, l’eau est d’un bleu intense et il y a très peu de monde, tout ce qu’on cherche !

Et le top du top, c’est qu’il est possible de dormir sur place. Il n’y a pas d’hôtel en dur car (pour une fois) la protection de la zone est bien respectée, mais on peut dormir dans des tentes installées sur la plage, sous les arbustes et à quelques mètres de l’eau. Le spot est incroyable, et très confortable (on ne peut pas dire que ça soit du camping : on dort dans des grandes tentes avec des vrais lits, et il y a des petites « salles de bains » en plein air). Comme en plus il y a un restau – bar bien fourni… Tout est réuni pour qu’on passe quelques jours ici !

Le plus dur à croire, c’est certainement que la magnifique plage de La Cueva n’est PAS la plus belle du coin (non, non !). La suivante, celle de Las Aguilas, gagne la palme haut la main.

Las Aguilas s’étend sur plusieurs kilomètres, avec la totale : eau turquoise et parfaitement transparente, sable blanc immaculé et végétation de savane en arrière-plan… le tout totalement à l’état sauvage, sans aucune construction ni aucune goutte de béton grâce à l’intégration de la plage au parc national de Jaragua.

Pour s’y rendre, depuis La Cueva il faut prendre un bateau (les tarifs très exagérés mais c’est l’option retenue par la grande majorité des visiteurs), ou alors suivre une piste impraticable pour les voitures : soit on marche, soit on a un 4×4 (qui sont autorisés jusqu’à un espace de « parking » au début de la plage, mais en fait personne n’y va comme ça et il y a juste le véhicule du garde forestier), soit on s’arrange avec un motoconcho, qui peut faire le trajet en slalomant entre les trous et les roches de la piste. On a fait un peu les faignants et c’est cette dernière option qu’on a choisie, la perspective des 8 kilomètres aller-retour sous le soleil de plomb nous ayant un peu découragés… En tout cas, la vue sur la cote depuis la piste est déjà superbe.

Pendant le trajet, on a pu remarquer qu’un hélicoptère nous survolait. En arrivant sur la plage, un petit attroupement s’était formé autour d’un type qui tenait un mini bébé tortue dans sa main et s’apprêtait à la (re)mettre à la mer, pendant qu’un photographe le mitraillait. Le type engage la discussion avec nous, et se présente : « je suis le Ministre de l’environnement ». Ah ok ! Donc on est en pleine opération de comm’ du Ministre dans le parc naturel ! Bon, allez, un petit selfie avec le ministre, avant qu’il ne remonte dans son hélico !

Quant à nous, après cette incursion à Las Aguilas, on s’est replié sur notre camp de base de Bahia La Cueva, où, en dehors d’un rapide aller-retour à la ville de Perdernales (sans grand intérêt), on s’est efforcés de ne rien faire pendant 3 jours hormis se baigner et apprécier le paysage… Avant de reprendre la route de Santo Domingo, via Barahona pour une étape d’une nuit (mais là aussi, la ville ne mérite pas vraiment plus de temps), puis de nouvelles aventures !


Infos Pratiques
Logement dans le sud-ouest dominicain : 
  1. Pension Iguana à La Descubierta. Chambres très propres avec SDB, 400 pesos par personne. Petit dej possible en plus sur demande (100 pesos), pareil pour le repas du soir (et c’est pratique car il n’y a pas grand-chose dans le village).
  2. A Enriquillo : Hôtel Don Frank, dans les hauteurs du village. Il n’y a pas d’enseigne et il faut donc savoir ce qu’on cherche, mais il est sur googlemap, en face d’un autre hôtel qui s’appelle Ecolodge vistamar. Chambre double avec SDB 1200 pesos. Basique, mais très bien pour une étape d’une nuit.
  3. Bahia La Cueva, Eco del mar : là c’est la petite folie du voyage, la nuit en tente confortable (vrai lit, douche et toilettes individuels, élecrticité et donc ventilateurs dans la tente) coûte environ 100 dollars US (après négociation, on nous a fait le tarif semaine pendant le week end). Mais l’emplacement est génial !
  4. Barahona, hôtel Loro Tuerto : pas ouf, mais c’est l’une des seules options de la ville. 1000 pesos par personne en chambre double avec SDB, un peu cher pour ce que c’est.

Circulation dans le sud-ouest dominicain :

Comme on l’explique en début d’article, la circulation est assez anarchique, mais rien d’insurmontable non plus. On conseille quand même d’éviter de rouler de nuit (beaucoup de nids de poule sur les routes et de motos non éclairées). Un point négatif aussi à signaler dans cette région, c’est qu’on rencontre de très nombreux points de contrôle de police sur la route, en raison de la proximité avec la frontière haïtienne (la Rep Dom n’est pas très cool avec les Haïtiens, qui ne sont pas super bien traités…).On passe toujours sans problème, mais c’est quand même un peu bizarre d’être contrôlé tous les 20 kilomètres et on sent bien que le contrôle se fait avant tout au faciès (on ne nous a demandé nos passeports qu’une seule fois sur des dizaines de contrôles)…  

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